A première vue, ceci ressemble à une empreinte digitale (enfin je l’espère). Une des empreintes uniques et infinies qui existent dans le monde. Une empreinte qui pourrait permettre de déverrouiller un téléphone. Une empreinte qui pourrait être scannée à l’aéroport. Une empreinte qui représente une identité.
Les empreintes font partie de notre vie quotidienne mais pourtant nous accordons trop peu d’intérêt à leur existence ou même leur signification. Pour ma part, c’est une pensée omniprésente depuis mon volontariat dans le camp de réfugiés de Nea Kavala au Nord de la Grèce, où j’ai eu la chance de rencontrer des personnes incroyables en provenance d’Afghanistan, de Syrie, d’Irak, d’Iran, de Somalie et bien d’autres. Des gens comme vous et moi fuyant la guerre, la violence et le traumatisme dans l’espoir d’un futur plus beau et plus sûr en Europe.
Du point de vue des gouvernements et du monde, ces hommes et ces femmes demandeurs d’asile ne sont qu’une multitude d’empreintes digitales sans papiers. Ils deviennent ainsi des informations dans les journaux ou sur les réseaux sociaux, des statistiques, des enjeux mondiaux si éloignés de beaucoup de nos vies qu’on ne les considère presque plus comme des individus. Et pourtant, derrière chacune de ces empreintes digitales, il y a un humain. Une personne qui a fait des sacrifices énormes, une personne avec une famille, une personne possédant des compétences uniques, une personne remplie d’espoir, une personne dotée d’une résilience indescriptible, une personne toujours prête à afficher un grand sourire, une personne qui a des rêves, une personne qui survit. Une personne. Tout. Comme. Vous.
J’ai donc réalisé ce dessin en revenant de Grèce après un mois intense avec l’association We Are Here, simplement parce que je ne voulais pas oublier. Et peut-être aussi parce que je voulais vous inviter à faire un pas en avant, et regarder de plus près. Chaque vie humaine mérite qu’on la considère et il faut continuer de voir au delà de ce que l’on généralise à travers les problématiques des migrations. Si on approfondit notre réflexion, on comprend vite que cela pourrait être nous derrière cette empreinte digitale. Alors, apporter de l’aide, aussi minime qu’elle soit, peut faire une différence si on se passe le message.
La crise des réfugiés est si profonde et compliquée que l’on peut facilement se sentir impuissant et submergé de notre point de vue. Il y a tellement de problèmes et d’enjeux, qu’ils soient politiques, juridiques, ou autres. En ce qui me concerne, je me sentais complètement ignorante et inutile. Après tout, je n’était qu’une simple personne avec peu d’influence ou de pouvoir sur quoi que ce soit. Cependant, après cette expérience, je crois vraiment qu’utiliser sa voix pour sensibiliser et donner de l’énergie, des ressources ou du temps — aussi peu que ce soit — représente un pas en avant.
Maintenant j’aimerais vous en dire un peu plus sur l’association We Are Here. Créé en 2016, il s’agit d’un centre communautaire et d’apprentissage situé dans le camp de réfugiés de Nea Kavala, près de la frontière macédonienne. Il offre de la solidarité aux résidents à travers l’éducation et les loisirs. Avec une équipe de volontaires montant jusqu’à 12 personnes, dirigée par Eliza, l’organisation propose 4 niveaux de cours d’anglais, un espace réservé aux femmes, un espace social avec des jeux et des ordinateurs, un espace adapté aux enfants (avec des chansons ultra accrocheuses — hello Baby Shark! ), des soirées cinéma, un club jeunesse de travaux manuels, des soirées dansantes.. et bien plus. Inutile de dire que ce projet est tout simplement magique.
Le monde est difficile, les relations sont compliquées, les enjeux globaux sont complexes. On ne peut pas tout résoudre. On ne peut pas créer des liens avec tout le monde. On ne peut pas tout savoir et tout comprendre. Et cela peut paraitre naïf, mais il est très difficile d’intégrer la profondeur du mal et les objectifs sous-jacents qui existent dans le monde. Mais parfois, nous passons tant de temps à nous sentir ignorants, impuissants ou accablés. Je me suis rendue compte que je préférerais donner un petit quelque chose, même si ce n’est qu’une petite goutte dans l’océan, car cela pourrait créer une vague dans la bonne direction. Cela en vaut la peine. Même si cela fait une différence pour une seule personne. Et finalement, cela vous montrera la quantité de gentillesse, d’intelligence et de bonté qui reste à trouver dans ce monde et We Are Here en est la preuve.